Découvrir l'Histoire du Gouffre de Proumeyssac

Curieuses histoires que celles de ce gouffre, où l’on retrouve bon nombre de légendes, dont celle des fameux canards. Ici ils vont par couple, et c’est parés d’un joli ruban autour du cou qu’ils auraient été jetés vivants dans l’abîme pour être retrouvés quelques jours plus tard sur la Vézère, nageant majestueusement sans doute, et lançant des coin-coin désespérés, aux environs de la fontaine de Frémulot. Pour donner quelque créance à cette opinion, une variante racontait qu’une autre paire de canards, jetés dans le trou, aurait reparu au bout d’un certain temps les ailes toutes brûlées, à Perdigat, commune de St-Chamassy à l’entrée d’une petite grotte d’où s’échappe une source abondante qui se jette immédiatement dans la Vézère…
Plus tard on parlera également de la vasque pétrifiante dans laquelle les jeunes filles jetaient une pièce d’argent dans l’espoir de se marier dans l’année. Aujourd’hui encore, y tremper ses doigts est censé porter bonheur…

 » Il semble bien que ce soit au début du XVIIIème siècle que se situent les plus lointaines évocations de l’existence du gouffre … « 

Il semble bien que ce soit au début du XVIIIème siècle que se situent les plus lointaines évocations de l’existence du gouffre, appelé alors “Trou de Promeissat“ (ou mieux encore “Cro (“Trou“ en langue d’Oc.) de Promeissat“). Il était, en ce temps-là, considéré comme étant le cratère d’un volcan éteint ! Dès 1755, dans un ouvrage intitulé “l’Oryctologie“, on peut lire : “Près du lieu-dit Drix, à une lieue et demie de Bugue sur la Vézère, et à quatre lieues de Sarlat, il s’élève de tems en tems par élancement des feus souterrains, qui brûlent le bois qu’on y expose. C’est un véritable volcan“.

Auréolé de cette légendaire mais tenace renommée, le trou de Promeissat, “duquel des personnes dignes de foi et vivant encore (1802), ont plusieurs fois vu sortir des flammes“, ne suscitait guère de vocations d’explorateurs… Vers 1755, pourtant, un intrépide habitant de cette contrée eut cependant assez de témérité pour vouloir affronter le gouffre et sonder cet abîme. “Il s’y fit descendre dans une hotte, attachée avec des cordes, après avoir eu la précaution de placer à l’entrée une sonnette dont il tenait en main le cordon ; mais arrivé à une médiocre profondeur, il se fit remonter, et rapporta qu’il avait aperçu de grandes cavités d’où il s’exhalait une vapeur étouffante qui ne permettait pas de descendre plus bas“.

 » De plus le lieu jouissait d’une autre renommée plus macabre : celle de faire disparaître fort aisément les cadavres des voyageurs détroussés et assassinés dans les environs… « 

De plus le lieu jouissait d’une autre renommée plus macabre : celle de faire disparaître fort aisément les cadavres des voyageurs détroussés et assassinés dans les environs : situation idéale de ce trou, jouxtant ce qui était alors la grande route allant de Sarlat à Bergerac, et fréquentée par les diligences. En 1778, le mercredi 29 avril, François de Paule Latapie, inspecteur des manufactures écrit dans son “journal des tournées“ : “A 1 demie-lieue du Bugue, au sud-est, sur un tertre* (butte, monticule. En Occitanie = coteau.) élevé, il y a un trou, fameux dans le pays par la quantité de personnes qui y ont péri, les unes par accident, les autres volontairement. On l’appelle le trou de Proumeyssac.

Son entrée est une espèce d’ovale évasé par ses bords et d’environ huit pieds de diamètre dans sa grande longueur. Il s’élargit en s’enfonçant, et de telle manière qu’il paraît que le fond est une vaste caverne qui communique à des grottes latérales, peut être fort étendues, de droite à gauche. En jetant de la paille enflammée qui a achevé de brûler au fond, et à diverses reprises, j’ai vu sensiblement la base de ce trou, mais il est couvert de cailloux qu’on y a jetés. On entend sensiblement, en prêtant l’oreille au bord du trou, le murmure du ruisseau qui coule vraisemblablement dans la direction de l’ouest et va se jeter dans la Dordogne. Les gros cailloux que nous avons jetés au fond, M. Pélissier et moi, ont employé cinq battements d’artère avant d’arriver sur le rocher, ce que j’estime quatre secondes : ainsi la profondeur serait un peu moindre de deux cents pieds. Le bruit que fait le caillou sur ces rochers, résonne en écho dans les grottes collatérales. Ce trou, comme je l’ai dit, est fameux dans ce pays-ci à cause de la quantité de personnes qui y ont péri. La plus connue de ces victimes est un seigneur de Limeuil du siècle dernier, qui y fut précipité par quelques uns de ses vassaux, las de ses barbaries. Les voisins font des vœux pour que ce trou soit bouché ; mais on pourrait du moins éviter les accidents involontaires en couvrant l’entrée par des planches ou de la maçonnerie sur soliveaux de traverse“.

Pour prévenir de nouveaux malheurs, on essaya vainement de combler le gouffre, véritable tonneau des Danaïdes, dans lequel des tombereaux de pierre succédèrent aux tombereaux de pierre, pendant plusieurs jours, sans résultat notable… La population locale décida alors de boucher l’orifice par une première voûte reposant sur des troncs d’arbres et de la terre rapportée. Celle-ci ne tînt pas, de même qu’une seconde sans doute mal étayée. C’est ici qu’intervint Jean-Baptiste-Louis Pélissier de Barry, juge royal du Bugue, dont le fils, jeune homme, avocat comme son père, avait guidé la visite de F. de Paule Latapie en 1778. Après avoir fait transformer l’étroit sentier dangereux qui bordait le Cingle en large chemin plus commode et approprié aux transports en pleine expansion, M. de Barry poursuivant son œuvre de bienfaisance, vint mettre fin à la terreur qu’inspirait ce “solfatare“, en fermant son cratère au moyen de voûtes superposées solidement maçonnées. Il faut savoir que M. de Barry, pour mener à bien ces travaux malaisés, eut l’idée de donner le gîte et le couvert à tous les clochards qui évoluaient dans la région, en échange de leurs services. Ce n’était là, en fait, qu’un avant-goût des T.U.C. que nous avons connu récemment ! Mais, malgré les efforts de tous, rapidement la nature reprit ses droits, effaçant toutes traces. Seules une croix en bois vermoulu, indiqua quelques temps la proximité du gouffre et les drames qu’il avait traversé. Un siècle plus tard, en 1881, cette croix est toujours présente dans une des brochures du poète buguois Gabriel Lafon : “J’arrivais enfin à l’endroit où se trouvait le gouffre, un léger affaissement de terrain en marquait seul la place. Au-dessus avaient poussé quelques chênes rabougris. Une croix de bois, mutilée par le temps et rongée par la mousse, balançait sous le souffle du vent ce qui lui restait encore de ses bras. Ce symbole chancelant de la foi était-il le souvenir pieux donné aux mânes de quelque infortuné, ou la commémoration d’un danger disparu ?“.

 » Depuis 130 ans que le gouffre avait été bouché, on en entendait plus guère parler dans le pays, si ce n’est dans les récits fantastiques des veillées enjolivés au fil des ans, lorsqu’en ce début de 1907, les voûtes vinrent brusquement à s’effondrer. « 
Depuis 130 ans que le gouffre avait été bouché, on en entendait plus guère parler dans le pays, si ce n’est dans les récits fantastiques des veillées enjolivés au fil des ans, lorsqu’en ce début de 1907, les voûtes vinrent brusquement à s’effondrer. Si le bruit fut important dans le gouffre, il le fut peut-être plus encore dans la région, et tous les journaux locaux s’en firent l’écho. Un léger effondrement s’étant produit dans un bois de châtaigniers appartenant à Pierre Francès, ce propriétaire eut l’idée de faire explorer l’excavation par M. Gabriel Galou, puisatier de métier bien connu, propriétaire-exploitant du restaurant du Paradis, établi dans les falaises du Roc de Tayac, mais surtout aventurier et casse-cou ! C’est donc lui qui s’aventura seul, le premier, dans le gouffre nouvellement redécouvert, le dimanche 10 mars 1907. Ayant installé ses appareils de puisatier, il descendit au moyen de cordages, jusqu’au sol inégal que constitue le sommet de l’énorme cône d’éboulis.

Que fut exactement cette première exploration ?

Malgré son éclairage sommaire, M. Galou y trouve un réel intérêt “rencontrant un nombre considérable de colonnes de cristal mesurant de 0,80 à 1 mètre de diamètre et de 5 à 6 mètres de hauteur ; sur un lit de cristal existent deux bassins d’eau d’une parfaite limpidité, dont l’un a 1,20 m de profondeur“.
A sa sortie, interrogé par la foule des curieux qui se pressent au bord du gouffre, il se contente de répondre : “Cela dépasse l’imagination la plus féconde ; je ne puis vous le décrire“ ; mais préconise une autre descente afin de parfaire ses investigations.

Cette seconde descente a lieu le vendredi 5 avril et confirme le grand intérêt que revêt la cavité puisque “nous posséderions là une grotte extrêmement curieuse, rivale du gouffre de Padirac“.
La “réclame“ -comme on disait alors- prend le relais et assure la promotion du gouffre par des articles détaillés :
“Nous sommes heureux d’apprendre que le gouffre de Proumeyssac est de plus en plus fréquenté. Grâce à la nouvelle installation qu’y ont établi les propriétaires, la descente s’opère en toute sécurité et c’est de toutes les parties du monde que les touristes viennent visiter cet immense abîme qui fait l’admiration de tous (…). On y descend au moyen d’un ascenseur et quatre personnes trouvent place dans la nacelle. Après avoir franchi une épaisse couche de rochers, l’ascenseur arrive comme au centre d’une immense cathédrale éclairée à l’acétylène. Le dôme en est majestueux et de toutes parts brillent des stalactites et des stalagmites d’une éclatante blancheur. C’est une demeure quasi sépulcrale où le silence n’est troublé que par le bruit monotone des cascatelles dont l’eau pure comme le cristal se perd dans d’autres gouffres plus profonds encore. La nature semble avoir prodigué là toutes ses faveurs et ce qu’on peut dire de ce lieu est bien au-dessous de la réalité. Pour s’en faire une idée exacte, il faut le voir“. (Aujourd’hui, nous ne pourrions que répéter ces dernières phrases !).
Le gouffre -qui s’étendait sous les propriétés de MM. Francès et Soulié- ainsi que le matériel d’exploitation, constituaient l’apport de ces derniers dans la société civile établie entre les sieurs Galou, Francès et Soulié, par acte passé devant Maître Castinel, notaire au Bugue, le 21 mai 1907.

Une vente par licitation du droit d’exploiter le gouffre jusqu’au 21 mai 1957 fut mise en adjudication aux enchères publiques, en l’étude de Maître Castinel, le 20 février 1910. Ainsi structurée sur de nouvelles bases, la société d’exploitation augmente le nombre de visites journalières, interrompues seulement par la guerre de 1914-1918. Mais ce n’est qu’à partir de 1924 que le tourisme souterrain à Proumeyssac prend réellement son essor. Dans une plaquette éditée en 1925, accompagnant un lot de cartes postales, Jean Vézère, poète buguois, relate ainsi les visites.
“Grâce aux travaux et aux sacrifices de MM. Soulié et Francès, la descente dans le gouffre n’offre aujourd’hui aucun danger, et cette exploration, autrefois si périlleuse, est devenue une partie de plaisir. On peut arriver en voiture et en automobile jusqu’à son orifice. Un treuil, solidement et bien conditionné, permet de descendre dans l’abîme de façon aussi sûre que commode. L’électricité a remplacé les éclairages de fortune du début, et répand sur les parois de ce précipice, où nos pères voyaient une bouche de l’enfer, des flots de laiteuse clarté.

Proumeyssac reçoit, pendant la belle saison, des milliers et des milliers de visiteurs. Trois par trois, les touristes prennent place dans la benne qui lentement s’enfonce le long d’un puits étroit et sombre. Bientôt on ne voit plus au-dessus de soi qu’un petit rond d’azur. Puis, à une dizaine de mètres au-dessous de l’orifice, les parois s’élargissent brusquement ; une lumière illumine une grandiose cavité souterraine où d’innombrables stalactites, en forme de lustres, de cierges et de colonnes, semblent le décor le plus prestigieux d’une cathédrale de rêve, d’un palais féerique, sculpté dans le marbre, taillé dans l’albâtre ou le cristal. La benne touche le fond (50 mètres), et les touristes suivent le guide à travers les couloirs et les galeries, évidées naturellement, dans la calcite éclatante de blancheur“.
Partie de plaisir ? Sans aucun doute ; mais agrémentée certainement de bien des peurs et des frissons car la benne était actionnée par un treuil autour duquel tournait un cheval.
Certains parlent même d’un âne, d’autres d’une mule ! Peu importe : c’était réellement une aventure ; et il vous est facile, de toute façon, d’imaginer les à-coups, les arrêts (!) au milieu de l’à-pic, correspondant aux humeurs de l’animal ou à ses préoccupations immédiates. Et tout ceci aussitôt répercuté en cris par les passagers de la benne. L’électricité étant, elle aussi, d’installation précaire, il était fréquent que le voyage s’effectue, partiellement… dans le noir ! Visite inoubliable ? Absolument garantie !
Quelques années plus tard, l’insécurité d’abord, la guerre de 1939-1945 ensuite, mirent fin à ces visites épiques. Le gouffre retombait dans l’oubli pour quelques années.

L’après-guerre voit la reprise du tourisme. Le Syndicat d’Initiative qui a été reconstitué et placé sous la présidence du dynamique et dévoué Marcel Maufrangeas, décide d’exploiter à nouveau Proumeyssac. En 1949, un conseil d’administration est formé, et en 1950, M. l’Ingénieur Chamine, directeur de la mine de lignite de Simeyrols, présente un projet : six millions de francs sont nécessaires. Ils seront rapidement recueillis et le 6 août 1950, le gouffre est à nouveau ouvert au public au cours d’une mémorable journée d’inauguration. Un ascenseur confortable, composé de deux cabines pouvant contenir chacune six personnes, a remplacé la vieille benne ; un groupe électrogène a pris la place de l’âne et les visiteurs affluent… En moins d’un mois, on enregistrait 5 000 descentes.
Mais Proumeyssac fait également l’objet de plusieurs visites du plus célèbre des spéléologues et la presse ne manque pas de répercuter ses commentaires : “Le gouffre de Proumeyssac est le seul de France et même, à ma connaissance, d’Europe, où l’on accède jusqu’au fond sans descendre une seule marche ou sans emprunter un tunnel artificiel d’accès. En effet, ici, le visiteur descend sans fatigue dans un ascenseur, hardiment suspendu dans le vide, qui débouche soudain dans le haut de la voûte en nef de cathédrale. La visite est, de ce fait, très originale et impressionnante, comme est tout à fait remarquable la décoration interne de cette splendide cavité. Le gouffre de Proumeyssac offre une profusion et une variété de stalactites, stalagmites et de draperies très pures et translucides qui en font un des plus beaux fleurons de la France souterraine“. Hélas ! En 1952 tout est remis en cause. L’ascenseur “hardiment suspendu dans le vide“ étant jugé dangereux par l’agence Veritas, le gouffre est de nouveau fermé plusieurs années. Un procès oppose d’ailleurs l’entrepreneur qui a réalisé les travaux, au conseil d’administration. En attendant le verdict, le matériel litigieux doit rester en place dans la cavité.

Beaucoup renonceraient, totalement découragés. Ce n’est pas le cas du persévérant Marcel Maufrangeas. En 1956, au cours d’une réunion à laquelle assiste Robert de Joly -autre spéléologue célèbre qui a, à son actif plusieurs aménagements touristiques de cavités- celui-ci conseille le percement d’un tunnel. Cette solution est adoptée, et malgré sceptiques et détracteurs, les travaux vont aller bon train.
L’arrivée dans le gouffre se fera à mi-hauteur d’une des parois, sur une plate-forme de 23 tonnes réalisée par l’architecte bordelais Raoul Jourde, auteur du stade de Bordeaux, et l’ingénieur Massé. De là, le visiteur bénéficiera d’une vue d’ensemble exceptionnelle. Le gouffre s’ouvrant assez loin de la route, il sera facile de rejoindre la surface moyennant une faible pente.
Si la réalisation d’une tranchée de 70 mètres, à l’air libre, par une entreprise locale, ne pose pas de problème, il n’en est pas de même pour le tunnel proprement dit, qui lui fait suite : 112 mètres à creuser dans le roc. Il faut faire venir de Suède un spécialiste de la mine qui, avec l’entreprise Labaudinière de Brive (Corrèze), se livre à un délicat travail afin de ne briser aucune concrétion.
Pour la portion la plus proche du gouffre, c’est un maître-carrier de Paussac, M. Large, qui, à partir de la cavité, doit effectuer une dizaine de mètres de percement à l’aide d’outils à main. Les deux sections se raccordent à la perfection. Le dernier coup de pioche sera “officiel“ et le champagne offert sur le plateau d’une camionnette installé dans cet immense parking boisé, consacre l’événement en présence d’amis et de notoriétés du département. Nous sommes le 28 février 1957. L’aménagement n’est pas terminé pour autant. Il y a des travaux à terminer, l’éclairage à fignoler, les extérieurs à nettoyer…
Bref, ce n’est que le jour de la Pentecôte 1957 que les guides en grand uniforme, coiffés d’une casquette galonnée et marquée aux initiales “G.P.“ (il y a là, Roger Francès et Fernand Soulié, les fils des inventeurs, Eyrignoux et Mérillou), peuvent prendre en charge les nombreux visiteurs qui se pressent pour admirer “la cathédrale de cristal“. Proumeyssac a retrouvé sa pleine activité d’antan.

Bien sûr, depuis 1957, les visites succèdent aux visites et la fontaine pétrifiante continue de recouvrir de brillantes paillettes de calcite, les objets qui lui sont confiés.

Marcel Maufrangeas, malade, ne profitera pas longtemps de ce gouffre réhabilité. Il quittera ce bas-monde, laissant le poste de directeur à Georges Laville, un commerçant apprécié au Bugue pour son dynamisme, son ardeur au travail et son esprit de créativité. Celui-ci, dans le même temps, prend la tête du Syndicat d’Initiative. Bien sûr, depuis 1957, les visites succèdent aux visites et la fontaine pétrifiante continue de recouvrir de brillantes paillettes de calcite, les objets qui lui sont confiés. Bien sûr, on pourrait s’en tenir là… Mais le démon de l’aventure, l’attrait de l’inconnu et le désir de faire encore mieux, subsistent toujours… Ce serait, si l’on s’arrêtait là, compter sans l’amour de Georges Laville pour ce gouffre et sans ses idées de recherches et d’améliorations…
Mais revenons donc un peu en arrière !
En 1907 déjà, E.-A. Martel envisageait l’existence d’un réseau plus profondément enfoui : “Actuellement, le ruisseau qui l’a pratiqué sans le terminer, est ou bien tari, ou considérablement diminué, en tout cas enfoui en profondeur sous le cône de débris. Son existence est prouvée par deux faits :
1 – Une petite source existe à l’Ouest, à Perdigat sur la rive gauche de la Vézère, à un niveau inférieur au fond du gouffre (je n’ai pas eu le temps d’aller le voir).
2 – Plusieurs des colonnes stalagmitiques au pourtour du cône de débris sont rompues en leur milieu ; on sait que ce fait, fréquent dans les grottes, témoigne de tassements souterrains généralement dus au travail d’eaux courantes (connues ou non) qui continuent leur travail de sape. Quant à retrouver le cours du ruisseau, comme l’espère M. Galou, cela me paraît bien aléatoire et subordonné au pur hasard ; on ignore l’épaisseur du cône de débris ; elle peut mesurer plusieurs décamètres. Et la calcite si dure à crever, a muré absolument toute la circonférence inférieure du gouffre ; vainement, on a brisé déjà en quelques points ce revêtement obturateur. Son bouchon n’a livré aucune solution de continuité suffisante pour continuer l’exploration. Rien ne laisse
préjuger en quel point il y a plus de chance de parvenir à une galerie accessible. J’ajoute que, selon toute vraisemblance, c’est seulement dans une direction, celle (tout à fait ignorée) de l’amont du courant qu’un ample couloir risque d’exister“.

Il n’est pas impossible qu’un lac existe mais je ne peux rien affirmer. Seules, des recherches poussées donneraient des résultats

Puis, dans les années 50, Norbert Casteret déclara aux journalistes :
“Il n’est pas impossible qu’un lac existe mais je ne peux rien affirmer. Seules, des recherches poussées donneraient des résultats“. Et la presse de 1956 révélait même : “Une faille a permis, en effet, un sondage. A 33 mètres, on n’a pas trouvé de fond ; il existe donc sous Proumeyssac un autre Proumeyssac, vraisemblablement plus vaste“.
Georges Laville décide donc, en 1973, de commencer par ce qui semble devoir être le commencement : l’évacuation des éboulis ! Ceci permettant de redonner au gouffre sa configuration naturelle, et -au-delà- peut-être pourrait-on découvrir de nouvelles galeries…
Ce n’est pas une mince affaire ! Mais il ne s ’en effraie pas et soutenu par son ami administrateur, R. Laval, il s’attaque au projet. Après bien des aléas, une imposante grue fait son apparition aux abords de l’orifice naturel du gouffre, plonge sa mâchoire monstrueuse dans ce trou et en extrait sa première pelletée de gravats Ainsi, durant 1974-1975, le gouffre est débarrassé d’une bonne partie de son énorme cône d’éboulis. Les tonnes de pierrailles qui y furent jetées jadis, ainsi que les produits des “éboulements naturels“ sont ramenés à la surface et évacués : 400 m3 de déblais sont ainsi mis ou remis au jour…
Dans ces tonnes de pierrailles… un examen attentif permit de découvrir des ossements d’animaux, des outils plus ou moins anciens, mais aussi des ossements humains (dont un morceau de crâne) qui pourraient apporter confirmation aux dires des braves gens du Moyen Age. Plus ancien encore, fut retiré des gravats, un coffret de pièces de bronze, appelées “blancs“ ou “douzains“ et frappées aux armes de François 1er. Tous ces trésors sont visibles dans le musée du site.
Depuis, à la charnière des années 1980-1990, sous l’impulsion de Madame Duret qui a repris le flambeau laissé par son père M. Laville, le gouffre s’est vu doté d’un nouvel éclairage très performant et d’une sonorisation, pilotés par ordinateur, de bâtiments d’accueil comportant musée, librairie, bar, boutiques de souvenirs et salles d’exposition. 1990-1998 : l’équipe Madame Duret-Alain Francès consacre toujours tous ses efforts pour l’amélioration et l’animation de ce gouffre. Naissent de leur collaboration, la surveillance des visites par caméras et télévisions, l’agrandissement d’un bon tiers de la plate-forme, l’accompagnement du service des guides par micros H.F.
Les propriétaires sont toujours les Francès, Soulié, et consort : les petits-fils et arrière-petits-fils des “aventuriers“ de 1907…
Des tentatives, pour l’instant (mais pour l’instant seulement !) restées infructueuses, n’ont toujours pas permis de rejoindre le réseau actif qui doit pourtant se développer sous l’éboulis du fond du gouffre et qui continue de faire rêver touristes et spéléologues…